4 juillet 2017
BASTAMAG
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Ce reportage de Sophie Chapelle
a été réalisé dans le cadre d’un partenariat avec l’association ISF SystExt, membre de la fédération Ingénieurs sans frontières.
Cette association regroupe des professionnels en activité ayant un intérêt
commun pour les systèmes extractifs, en particulier miniers.
Ces Lorrains qui
luttent courageusement pour un avenir dépollué de l’héritage minier.
C’est une victoire judiciaire qui en appelle d’autres : le 30 juin, la compagnie
Charbonnages de France a été condamnée à verser 5,9 millions d’euros à Rosbruck,
une commune lorraine, sinistrée par les dégâts miniers. Dans cette région, la
vie de milliers d’habitants est empoisonnée par d’anciennes mines de fer et de
charbon, dont les exploitants ont laissé derrière eux d’immenses problèmes :
maisons fissurées à la limite de l’effondrement, rivières mortes à force d’être
goudronnées, pollution des nappes phréatiques, risque d’inondations...
Habitants, élus et associations luttent ensemble sur le front judiciaire et
législatif. Alors que des mines de sel sont toujours en activité et que des
permis d’exploration de gaz de houille viennent d’être accordés, ils se
désespèrent des orientations prises par la réforme du code minier, qui écarte
les enjeux environnementaux. Mais conservent une détermination intacte pour
défendre les droits des générations futures. Reportage.
« Il n’y a rien qui vous choque ? » C’est
la première question posée par Joëlle Pirih lorsqu’on entre chez elle. Rien de
visible de prime abord, mais une sensation de malaise tout de même, similaire à
celle du mal de mer. Le regard s’accroche alors à des cales disposées à
plusieurs endroits de la maison pour mettre à niveau le mobilier ou retenir les
portes qui menacent de claquer. « Il y a 3 % de pente dans la cuisine »,
annonce Joëlle. Une inclinaison de trois centimètres par mètre. « D’un bout à
l’autre de la maison, en diagonale, il y a 45 centimètres de différence ! »
La maison de Joëlle et Gaston penche, et c’est loin d’être la seule à Rosbruck,
village mosellan de 785 habitants situé à la frontière franco-allemande, non
loin de Forbach. De nombreuses façades arborent de larges fissures. « Quatre-vingt
maisons ont été détruites dans la commune : leurs fondations n’étaient pas
suffisantes pour résister à l’affaissement », énonce Gaston.
En cause selon les habitants : les veines de charbon que les Houillères du
bassin de Lorraine (HBL), filiale de l’établissement public Charbonnages de
France, ont creusé sous le village. HBL a utilisé la technique du foudroyage qui
consiste à laisser s’effondrer les terrains derrière le passage de la haveuse
(une machine qui sert à excaver), au lieu de remblayer les galeries avec des
apports extérieurs. « A chaque fois que ça s’écroulait, il y avait des
secousses, se remémore Joëlle. « C’est à cause de leur méthode
d’exploitation que nous sommes victimes de tels dégâts. Ailleurs, les
exploitants sont obligés de remblayer. Chez nous, ils ont sacrifié le
village ! » Gaston en est certain : « Le foudroyage sans remblais, ils ne
l’auraient jamais fait sous Matignon ou les Champs-Élysées ! »
« Comment voulez-vous que les gens aient confiance en l’État ? »
Bernard Glanois, membre de la Confédération
de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV) de Rosbruck,
mène sans relâche depuis vingt ans une bataille judiciaire contre HBL. « Ils
ont utilisé le foudroyage pour faire des économies. S’ils remblayaient, la tonne
de charbon coûtait 750 francs ; là, c’était 75 francs. Mais leur calcul était
faussé car ils ne tenaient pas compte des dégâts en surface, ni de
l’écologie ! » Selon les expertises réalisées, le quartier où résident
Joëlle et Gaston Pirih est descendu de douze mètres entre 1984 et 2005. « Nous
avons construit dans les années 80 en toute ignorance d’une exploitation
future », déplore Gaston. Avec Joëlle, ils ressentaient parfois des
vibrations. Puis, ils ne sont plus arrivés à fermer les fenêtres. « Peu à
peu, l’eau de pluie a commencé à s’écouler contre le mur, l’humidité est montée,
les pièces ont moisi. A la mairie, on nous disait que ce n’était pas la faute
des mines, mais de malfaçons. »
En 2003, HBL cesse l’exploitation de la mine. La maison mère, Charbonnages de
France, est dissoute cinq ans plus tard. Difficile pour les habitants du bassin
houiller de savoir contre qui ils peuvent désormais se retourner. « Charbonnages
de France était un EPIC (établissement public à caractère industriel et
commercial, ndlr) et aujourd’hui, l’État se défausse. Son service juridique
n’existe plus, alors on nous renvoie vers Bercy. Quand on est reçus au
ministère, ils disent qu’ils sont du côté des sinistrés tout en faisant trainer
les procédures », dénonce Bernard Glanois.
Ce dernier nous emmène devant une maison abandonnée depuis une dizaine d’années.
Les stigmates des crevasses minières cernent l’entrée. « La maison a d’abord
été réparée par HBL, puis relevée avec des vérins sous les fondations, avant
qu’un coin de la maison ne s’effondre à nouveau. La propriétaire a fini par
obtenir une indemnisation financière, mais elle était épuisée. Comment
voulez-vous que les gens aient confiance en l’État ? »
Onze ans de batailles judiciaires
La mobilisation des habitants sinistrés s’est traduite en mars 2001 par
l’élection d’un nouveau maire, Pierre Steininger, à la tête d’une liste
citoyenne. « Rosbruck est la commune la plus sinistrée du bassin houiller
lorrain », atteste t-il, évoquant les dysfonctionnements des réseaux
d’assainissement, le « déficit d’image » et la « perte de rentrées
fiscales » avec le départ de 250 habitants en moins en dix ans. Bien décidé
à faire reconnaître les dégâts miniers – évalués à 8,7 millions d’euros par des
experts – le maire a finalement obtenu gain de cause après onze ans de bataille
judiciaire. En août 2016, le tribunal de grande instance (TGI) de Sarreguemines
a fait verser par l’État une provision d’un million d’euros à la commune pour le
préjudice subi.
Ce 30 juin 2017, le tribunal a statué sur le montant précis de l’indemnisation
pour Rosbruck : il a condamné Charbonnages de France à payer 5,9 millions
d’euros. « Franchement c’est quand même une belle victoire pour la commune »,
a réagi le maire Pierre Steininger, « on va pouvoir faire des réparations qui
commençaient à être urgentes. La priorité des priorités, c’est la reconstruction
de notre groupe scolaire » [1].
Des habitants sont engagés dans des procédures parallèles. Quarante-cinq
dossiers sont en appel au tribunal de Metz pour des indemnisations relatives aux
pentes. Vingt-cinq familles sont également en procès pour les risques
d’inondation. Avec les affaissements miniers, une partie des maisons de Rosbruck
se situent désormais en-dessous du niveau de la rivière, La Rosselle, un
affluent de la Sarre... C’est le cas de la maison des Pirih qui se retrouve en
zone inondable. « Ce sont toujours les plus modestes qui paient le prix le
plus fort », s’indigne Bernard Glanois.
En lutte face au nouveau code minier
Les affaissements miniers ne concernent pas seulement le bassin houiller. A
Auboué, une ville au Nord-Ouest de Metz où étaient exploitées des mines de fer,
des affaissements ont eu lieu il y a vingt ans. « 180 familles ont vu leurs
maisons détruites », se remémore Colette Gœuriot, à l’initiative du
collectif de défense des bassins miniers lorrains, qui rassemble des sinistrés,
des élus et des représentants d’associations. Les membres du collectif se
mobilisent sur la réforme en cours du code minier, dans un contexte où Nicolas
Hulot et le gouvernement se sont engagés à ne plus délivrer de permis de
recherche et d’exploitation d’hydrocarbures. Mais le doute plane pour savoir si
cela passera par la réforme du code minier ou une loi spécifique.
« Il y a une pression du patronat minier pour pouvoir exploiter les mines sur
nos territoires dans des conditions qui les arrangent, en écartant les questions
environnementales et les futures indemnisations »,
dénonce Colette Gœuriot. « Souvent, les gens nous disent que "la mine est un
sujet qui appartient au passé" », poursuit Olivier Tritz, président du
collectif. « Nous, nous disons que c’est un sujet du présent et du futur avec
une dimension nationale et internationale, d’où l’importance de se mettre en
réseau. Aujourd’hui, nous avons des documents qui intègrent davantage les
questions environnementales, pour faire face aux lobbies. »
Lire
à ce sujet notre enquête : Or,
cuivre ou gaz de schiste : la France sera-t-elle livrée aux convoitises des
compagnies minières ?.
Membre du collectif, Loris Ravasio se bat « pour une vraie loi
« après-mine » ». Il préside l’association des victimes des dommages miniers
dans le bassin de Piennes-Landres. Ces communes de Meurthe-et-Moselle ont connu
plusieurs affaissements successifs depuis 1994. « Dans le code minier
français, il n’y avait rien de prévu pour défendre l’environnement et les
populations en lutte. Les 130 maisons sinistrées se sont retrouvées totalement
exclues de la loi. C’est inadmissible que des gens soient sinistrés et non
indemnisés ! Il est important que le code minier soit protecteur de
l’environnement et des populations. »
Qu’en sera t-il pour l’avenir, alors que de nouveaux projets voient le jour ?
Outre l’ouverture d’une première mine d’or prévue d’ici 2020 en Guyane, une
dizaine de permis d’explorer ont été attribués ces dernières années en
métropole, pour chercher de l’or, du fer, du plomb, du zinc, du cuivre ou du
lithium. A l’est de la Moselle, des arrêtés concernant quatorze puits de forage
de recherche de gaz de houille ont été délivrés en 2016 [2].
Gaz radioactif, inondations et risques de pollution
Face à ces nouveaux projets, des élus et associations tentent d’alerter sur les
conséquences environnementales et sanitaires des exploitations passées. Fabienne
Menichetti est maire d’Ottange, une ville de 2 750 habitants. Des galeries,
faisant suite à l’exploitation de trois mines de fer, y quadrillent le
sous-sol. « Notre commune est contrainte à plus de 80 % par le plan de
prévention des risques miniers (PPRM) », témoigne l’élue socialiste. Il est
devenu presque impossible de construire sur ce territoire, ce qui déclenche des
tensions entre les habitants. « L’intérêt du PPRM est que la responsabilité
en cas d’affaissements incombe au Préfet, et plus au maire », complète
Oliviez Tritz. « Tout l’enjeu est d’arriver à continuer à développer les
communes, en prenant en compte les risques, pour qu’elles ne deviennent pas des
communes fantômes. »
Fabienne Menichetti s’inquiète également des remontées de radon, un gaz
radioactif naissant dans les cavités, qui favorise les cancers pulmonaires selon
l’Organisation mondiale de la santé [3].
Le conseil municipal d’Ottange a d’ailleurs prévu l’installation prochaine de
détecteurs de radon dans tous les bâtiments publics.
« On a surtout perdu toutes nos rivières »,
alerte Fabienne Menichetti. Comment expliquer ce phénomène ? Durant
l’exploitation minière, l’eau drainée par les galeries était pompée par
l’exploitant afin de permettre la poursuite des extractions. Certaines communes
ont ainsi observé le tarissement de sources et l’assèchement de cours en amont
de certaines rivières. En parallèle, le rejet de cette eau extraite des cavités
– appelé « exhaure » – dans les cours d’eau voisins a artificiellement augmenté
leur débit. Mais la fin de l’exploitation des mines génère désormais des risques
d’inondation : l’arrêt du pompage par les entreprises exploitantes a conduit à
la remontée du niveau de l’eau qui noie progressivement les galeries – on parle
d’« ennoyage ». Résultat : des quartiers se retrouvent partiellement inondés
comme à Creutzwald, une ville à proximité de Rosbruck. « Il n’y a par
ailleurs aucun inventaire des produits laissés au fond des mines de la Houve »,
s’inquiète Michel Chardeau, retraité des Houillères et membre de l’Adelp,
une association locale de défense de l’environnement.
« Faire au mieux »
Face au risque de pollution généralisée des nappes phréatiques et des forages
d’eau potable, c’est désormais le BRGM – Bureau de recherches géologiques et
minières, un organisme de l’État – qui, suite à la liquidation de Charbonnages
de France, se charge du suivi de « l’après-mine » [4].
Le BRGM a mis en place, depuis fin 2009, un pompage de l’eau de mine de La
Houve. L’eau extraite est reversée dans un bassin de décantation, puis traitée
avant d’être rejetée dans le milieu naturel. C’est le BRGM lui-même qui réalise
les analyses d’eau, sous le contrôle de la Direction régionale de
l’environnement, de l’aménagement et du logement (la Dreal, service déconcentré
du ministère de l’Environnement).
Au sommet du terril qui surplombe ces bassins se dévoilent aussi les schlamms,
déchets miniers composés de charbon, d’eau et de cendres. « Un arrêté
préfectoral demande la remise en état des terrains, mais au lieu de réhabiliter,
l’État préfère le terme magique de "mesure compensatoire" », se désole
Michel Chardeau. Vous voyez là-bas, au milieu des schlamms, ils ont fait une
petite mare pour les pélobates (espèce d’amphibien, ndlr). Après 150 ans
d’exploitation minière, il ne peut pas y avoir un retour en l’état des terrains.
La seule question qui se pose maintenant, c’est comment faire au mieux. »
La rivière la plus polluée d’Europe
La gestion de l’après-mine, c’est aussi la préoccupation d’Helmut Birtel, ancien
électromécanicien à la mine. Helmut vit à Petite Rosselle, à dix kilomètres de
Rosbruck, et milite à l’Adepra,
une association locale de défense de l’environnement : « La Rosselle, qui
menace d’inonder Rosbruck, a reçu la peu glorieuse distinction de "rivière la
plus polluée d’Europe". Il n’y a plus de poisson depuis cinquante ans, c’est une
rivière totalement morte ! » [5] L’eau
claire de cette rivière a laissé place à un fonds recouvert de goudron. Aucun
doute pour les membres de l’Adepra : ce sont les rejets de l’ancienne cokerie –
l’usine où était distillée la houille pour produire la coke, utilisée dans le
chauffage domestique et l’industrie métallurgique – qui ont pollué l’eau.
Leur combat se porte désormais sur le gazomètre, une énorme cuve contenant
40 000 tonnes de produits chimiques divers – soufre, hydrocarbures, ammoniac...
– située sur le site de l’ancienne cokerie. L’étanchéité est assurée par une
simple géomembrane. Le stockage devait être provisoire, mais il dure depuis
bientôt trente ans... « S’il y a une fuite, les nappes phréatiques seront
polluées, on n’aura plus d’eau potable pendant des décennies, redoute Helmut
Birtel. C’est une bombe à retardement ! »
Malgré les risques et les alertes lancées, l’association peine à mobiliser la
population. « On n’a plus un seul commerce ici, à Petite Rosselle (6 600
habitants), avance Henri Ostogorsky, ancien mineur. Depuis la fermeture des
mines, une grande partie des gens travaillent en Allemagne. Les Houillères nous
laissent un monde où ce sont nos petits-enfants qui vont payer les dégâts. » A
l’entrée de leur maison, Joëlle et Gaston Pirih l’affirment : « Tous les
jours, c’est un calvaire. Même si notre maison était vendable, nous ne voulons
pas faire subir à d’autres personnes ce que nous subissons. Nous sommes
prisonniers. »
Texte et photos : Sophie Chapelle
Photo de Une : United Nations Photo
20 avril 2017
Pour les élections présidentielles les politiques ne se sont pas bousculés à
Rosbruck !
Samedi 1 avril 2017
Documentaire France 2 diffusé le 31 janvier
2017
De : Hugues Nancy Fabien
Béziat Guillaume Terver
Résumé : En plus du drame humain consécutif à
l'arrêt de l'exploitation d'une mine, ce sont aussi des questions
environnementales et d'urbanismes qui apparaissent.
À travers plusieurs exemples, les réalisateurs s'interrogent sur
la situation des mineurs et des cités qui les ont
abritées.
Après plus de deux siècles d'exploitation minière, les dernières
mines de charbon ont fermé leurs portes, laissant derrière elles des hommes et
des territoires dévastés. Dans les bassins miniers du Nord-Pas-de-Calais
jusqu'au Sud-Ouest en passant par la Moselle, la Loire et le Bassin
méditerranéen, les communes tentent de conduire au mieux la transition entre
énergie fossile et énergie renouvelable tandis que les héros de la mine tombés
dans l'oubli se battent encore pour défendre leurs droits, entretenir la mémoire
de leur métier et parfois simplement pour rester en vie. «Une vie après la mine»
a ainsi recueilli les paroles, combats et souvenirs d'anciens mineurs
4
janvier 2017
5 octobre 2016
L'une des trois croix du clocher
penchée de Rosbruck qui est en cours de démolition
© Radio
France - Thomas Jeangeorge
Victime des affaissements miniers, ce village de 800 habitants a
touché en août dernier une provision d'un million d'euros pour effectuer des
travaux d'urgence. Le clocher " penchée " de Rosbruck est notamment en cours de
démolition.
Rosbruck vit sur une sorte de gruyère à cause des affaissements miniers. Plusieurs bâtiments se sont enfoncés dans le sol, se sont
fissurés ou penchent parfois dangereusement. Le village est donc en procès
depuis presque 12 ans avec Charbonnage de France. Et grâce à l'obtention sur
décision de justice d'une provision
d'un million d'euros,
la municipalité vient de lancer plusieurs chantiers. Depuis le lundi 3 octobre, la
démolition du clocher de Rosbruck, une sorte de Tour de Pise locale a
notamment débuté.
Pas d’autres choix que la démolition
Après une manœuvre d'une dizaine de minutes, la grue de 40mètre vient de déposer
au sol l'une des 3 cloches du clocher. L'édifice a été construit à la fin des
années 50. Mais au fil des années, victime des affaissements miniers, il a
commencé à pencher dangereusement et certaines des parties du bâtiment
menaçaient aussi de se détacher et de s’écraser au sol. Par mesure de sécurité,
la démolition s'est donc imposée. « On
aurait pu relever le clocher, comme ce fut le cas dans les années 90 mais aucun
expert nous a garantis cette fois la pérennité de l’opération et en plus,
c’était très couteux » explique le maire de Rosbruck Pierre Steininger.
De
7 à 77 ans, les curieux et les nostalgiques assistent à la démolition, comme
Victor assis sur un banc : « Dans
les années 50, j’ai participé à la construction de ce clocher. On le voit depuis
tout le village et le bruit des cloches, on le connaît par cœur. De voir cette
démolition, ça me fait un peu mal au cœur »
Des haut-parleurs pour remplacer les cloches
La
croix et les 3 cloches vont être précieusement conservées. Le maire Pierre
Steininger espère à moyen-terme construire un nouveau clocher « Cela dépend en fait de la somme que va
finalement nous allouer la justice. Normalement on devrait encore toucher 7,7
millions d’euros.
Si c’est moins, on va devoir fixer certaines priorités, car il y a d’autres
chantiers à mener sur la commune, comme la rénovation de la voirie de la rue de
la maire ». En attendant d'en savoir plus, la
mairie a installé sur l'église de Rosbruck des haut-parleurs qui diffuseront le
bruit des cloches.
La
démolition du clocher de Rosbruck (50 000 euros HT) devrait être terminée la
semaine prochaine. Grâce à cette provision d’un million d’euros, la municipalité
a aussi mené des travaux au cimetière (25 000 euros HT). Un expert a estimé à
8,7 millions d'euros le préjudice subi par la commune. Le maire de Rosbruck
attend maintenant que cette somme soit définitivement validée par la justice.
Une réponse est attendue avant la fin de l'année ou début 2017.
31 octobre 2016
14 mai 2016
3 mai 2016
23 avril 2016
12 mars 2016
20 janvier 2016
6 janvier 2016
4 novembre 2015
31 octobre 2015
Dans le bassin houiller lorrain,
"l'enfer" des habitants dont les maisons penchent
Des portes qui s'ouvrent et se ferment sans arrêt, des lits qui penchent: un
quotidien "invivable" pour une cinquantaine de familles de Rosbruck, au cœur du
bassin houiller lorrain, qui accusent les anciennes mines d'être responsables de
leur malheur.
De loin, c'est un petit lotissement bien tenu: jardins fleuris, quelques
citrouilles rappelant qu'Halloween approche, en contrebas un sentier qui sent
les promenades du dimanche. "Ici, ce serait le paradis", sourit amèrement Joëlle
Pirih.
Pour elle, et une cinquantaine d'autres familles, Rosbruck, petite commune posée
à la frontière allemande, est devenu un enfer. "Comme une prison", ajoute son
mari, Gaston.
C'est que la ville penche - au sens propre: dans certaines maisons, le sol est
incliné de 3cm par mètre après des affaissements du sol, dans une région où le
dernier puits d'extraction houillère a fermé en 2004.
"Si vous prenez un lit de deux mètres, il vous faut une cale de 6 cm à un bout",
explique Pierre Steininger, maire de cette petite ville de 800 habitants.
Ils étaient un peu plus de 1.000 dans les années 1990. Mais environ 80 maisons
ont été détruites - trop touchées par les affaissements de terrains, explique
l'édile.
Cela fait bientôt 15 ans qu'il occupe la mairie. Elle penche aussi, d'ailleurs:
derrière l'accueil, une immense armoire ne touche le plafond que d'un côté.
M. Steininger raconte des années de combat face à Charbonnages de France -
aujourd'hui BHL - contre qui trois procédures sont encore en cours: deux menées
par des habitants, une par la commune.
"J'ai connu ça, vivre dans une maison en pente de 3%. Quand vous êtes debout,
vous êtes obligés de contrebalancer, ça fait que vous avez des problèmes de dos.
Les portes s'ouvrent et se ferment sans arrêt. C'est des petits détails, qui
pour quelqu'un d’extérieur paraissent peut-être insignifiants. Mais au
quotidien...".
Mme Pirih le coupe. "C'est invivable. Insalubre, même", lance la jeune
grand-mère qui dirige la branche locale de l'association Consommation, logement
et cadre de vie (CLCV).
- Penchée et inondable -
Quand on entre chez les Pirih, pour peu que l'on ait l'oreille interne un peu
sensible, un mal de cœur lancinant se fait vite sentir.
Et pas question de baisser la garde quand on mange sa soupe, raconte Mme Pirih.
"Moi je garde toujours une serviette bien à côté. Parce que si ça tombe par
terre, il faut se précipiter et courir avant que ça ne coule..."
Si la maison penche, elle est aussi passée, il y a quelques années, sous le
niveau de la Rosselle, une rivière qui coule non loin de là.
Rosbruck s'est enfoncé de près de 14 m à la suite, estiment les habitants, de
l'exploitation dans les années 1980 des veines de charbon par "foudroyage",
technique qui consiste à laisser s'effondrer les galeries au lieu de les
remblayer.
Désormais, une partie des maisons sont en terrain inondable - c'est le motif de
l'un des procès intentés par les habitants.
Dans cette action en justice - comme dans les autres, une bataille d'experts
s'annonce.
Fin octobre, la cour d'appel de Metz a d'ailleurs ordonné une nouvelle
expertise, maison par maison.
Pour l'avocate de Charbonnages de France, aujourd'hui en liquidation, Me
Véronique Heinrich, les habitants "ne prouvent jamais l'imputation des dégâts à
l'activité minière".
"Dans le lot, il y a des gens qui ne souffrent pas de dégâts miniers",
estime-t-elle, avançant que "la mise en pente peut être d'origine minière comme
liée à une mauvaise construction".
De quoi faire enrager Joëlle et Gaston Pirih, dont la maison ne vaut, selon eux,
plus rien, à cause des dégâts miniers.
Des déclarations impossibles à étayer sans l'intervention de plusieurs experts.
La mairie en a d'ailleurs embauché deux pour estimer le coût des travaux à
réaliser pour remettre droits les principaux bâtiments - même si le budget est
"ric-rac", reconnaît le maire.
Selon leur dernière estimation, ces travaux coûteraient près de neuf millions
d'euros.
AFP
22 octobre 2015
15 Septembre 2015
FR3 :
Les explications de Florence Grandon et Benoit Bour
Rosbruck : des habitants lésés attaquent Charbonnage de France
Des habitants de Rosbruck (Moselle) ont assigné en justice Charbonnage de
France. Leurs maisons, victimes d'affaissements miniers, se retrouvent à 4
mètres sous le niveau de la Roselle et des travaux de prévention leur sont
désormais imposés par la Loi. Sans aucune indemnisation.
Une quinzaine d'habitants de Rosbruck (Moselle)
au coeur du bassin houiller lorrain n'en finissent plus de payer les
conséquences de l'activité charbonnière plus de dix ans après son arrêt : après
les affaissements, ils sont désormais confrontés aux risque d'inondations car
leurs maisons se retrouvent à 4 mètres sous le niveau de la Roselle. Ils se
voient ainsi obligés de financer des travaux imposés par la législation. Sans
aucune aide ni compensation financière.
Pour faire reconnaître et indemniser leur préjudice ils ont choisi d'assigner
Charbonnage de France, assistés par l'association CLCV de la commune. Première
audience le 6 octobre 2015 pour des habitants souvent âgés, mais résolus à se
battre car tous ont d'ores et déjà perdu l'essentiel de la valeur de leur
patrimoine. Sous le regard absent des pouvoirs publics.
3 juillet 2015
2 novembre 2013
11 mai 2010
11 mai 2010
JUSTICE TGI DE SARREGUEMINES
52 sinistrés contre Charbonnages de France
Hier, la 1ère chambre civile du tribunal correctionnel de
Sarreguemines a examiné une seule affaire composée de 32 dossiers. Les sinistrés
miniers de Moselle-Est réclament réparation à CDF. Délibéré en septembre.
"Venez chez nous, on vous invite ! Vous n’y habitez
pas ! Parlez pas dans le vide !".
Hier matin, au sortir de la salle d’audience, des sinistrés
miniers de Moselle Est interpellent Me Cathy Noll, avocate de Charbonnages de
France.
Deux heures durant, la 1ère chambre civile du tribunal de grande
instance de Sarreguemines, présidée par Francis Carle, a examiné le dossier
opposant cinquante-deux familles de sinistrés miniers à la société Charbonnages
de France.
L’audience s’est déroulée en présence d’une soixantaine d’habitants de Cocheren,
Rosbruck, Morsbach…
Leurs maisons penchent, sont fissurées.
Pour eux, un responsable : Charbonnages de France. Me Achille Cytrynblum, leur
avocat, demande à Charbonnages de France une indemnisation complémentaire à
celle accordée par le fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) avec,
comme critère de référence, le pourcentage de pente.
Pendant une heure et quart, l’avocat retrace l’historique de l’exploitation
minière en Moselle Est, stigmatise « la violation du principe de précaution »
occasionnée par « l’exploitation sous des zones habitables », dénonce « la
technique de « foudroyage » qui aurait laissé « un millefeuilles d’espaces
vides [et transformé] le sol en véritable gruyère sous les communes de Rosbruck,
Cocheren, Morsbach… »
Me Cytrynblum explique que « le fonds de garantie n’indemnise que les
aggravations » constatées après le 1 er septembre
1998, la procédure judiciaire actuelle vise à « obtenir réparation » pour les
sinistrés dont les dégâts, d’évolution lente, sont antérieurs à cette date.
Expertise
L’avocat demande que le barème retenu soit celui du
FGAO et non « le barème HBL.»
L’exploitant doit
remettre le bien de la personne victime dans son état d’origine. Il s’agit ni
d’enrichir ni d’appauvrir.
Me Martine Génin, du barreau de Sarreguemines et Me
Cathy Noll du barreau de Mulhouse représentent Charbonnages de France.
Le débat de mon confrère consiste à dire il faut enrichir », estime
Me Génin. Et de poursuivre : « Je pense indispensable de faire une expertise. »
Sa consœur développe des exceptions portant sur le titre de
propriété, la prescription. Me Noll conclut : « CdF veut bien relever les
maisons mais cela n’a jamais été demandé. L’intérêt du demandeur n’est peut-être
pas là où vous le pensez. »
Me Génin évoque les « rapports pas fiables » qui seraient produits
par Me Cytrynblum et plaide : « CdF vont payer mais avant il faut faire des
expertises.
Et d’insister : « Je n’imagine pas que votre tribunal rende une
décision sans expertise. »
En réponse au président, Me Noll indique que « l’existence des
pentes n’est pas contestée mais les mesures le sont. »
Délibéré le 14 septembre.
17 mars 2009
10 mars 2009
25 février 2009
2007
2006
19 juin 2006
11 avril 2005
Rosbruck, le village qui penche
Le sol se dérobe sous le village de Rosbruck, situé aux confins du bassin
houiller lorrain. Les galeries de mines de charbon, aujourd'hui abandonnées,
creusées dans un sous-sol surexploité, s'effondrent et emportent avec elles les
maisons. Francis Prymerski, ancien mineur et syndicaliste de toujours, met sa
colère et son expérience au service des sinistrés.
L'hiver, il fait un froid à fendre les pierres. Pourtant, les rigueurs du climat
ne sont en rien responsables de l'état des maisons.
Rosbruck, 924 âmes, dans l'extrême est de la Moselle, n'en finit pas de se
fissurer. En dix ans, le village s'est enfoncé de 18 mètres. L'équivalent d'un
immeuble de 6 étages ! Posé sur le vide, Rosbruck s'effondre. Inexorablement.
« Nous vivons au-dessus des galeries »
«
Durant plusieurs décennies, les Houillères du bassin de Lorraine (Hbl) ont
creusé la terre à outrance pour en extraire le charbon. Les galeries font
plusieurs kilomètres de long sur, parfois, 150 mètres de large et 4 mètres de
haut, et nous vivons juste au-dessus », décrit Pierre Steininger, élu maire en
2001 par les sinistrés, décidés à se faire entendre.
Sous les nuages au ventre lourd, les maisons qui bordent la route nationale
semblent prêtes à basculer. Entre septembre 1998 et juillet 2004, 945 secousses
telluriques ont été enregistrées à Rosbruck.
Dans le sous-sol du bassin houiller, les anciennes galeries crient leur colère.
En surface, c'est la désolation. Grignotée, creusée, évidée, la terre lorraine a
donné le meilleur d'elle-même aux Houillères. Baptisée Dora, la veine de charbon
qui passe sous Rosbruck a été exploitée jusqu'en octobre 2003. A la place du
minerai, l'exploitant a laissé d'immenses cathédrales souterraines aux piliers
fragiles comme du verre, rongées par les eaux d'infiltration. Tout le monde le
savait, tout le monde a laissé faire.
En une soirée la maison s'est fendue en deux
«
Dans le bassin minier, 95 % des municipalités baissent la tête devant les Hbl.
Rosbruck est le village des irréductibles Gaulois. Ici on se bat. »
Francis Prymerski, quarante-huit ans, n'a jamais mâché ses mots. Vingt-cinq
années passées à la mine forgent le caractère. Rompu au bras de fer avec les Hbl,
son employeur durant plus de deux décennies, il a mené tous les combats au sein
du Chsct (comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail).
En 1997, Francis a dû abandonner sa maison à Betting, à portée de vue de
Rosbruck. En une soirée, l'imposante bâtisse s'est littéralement coupée en deux.
Des étais de bois ont depuis remplacé les magnifiques rosiers grimpant le long
du mur.
Sur la façade, visible depuis le siège des Houillères du bassin de Lorraine,
devenues Charbonnages de France depuis la fermeture des dernières mines, il a
fixé une banderole géante clamant : « Maison victime de dégâts miniers ». Non
pas pour défier, juste pour crier la vérité. Une vérité qui selon lui tarde à
éclater.
«
Les gens vivent dans des conditions épouvantables. Mais, face au lobby que
représentent les exploitants miniers, les élus préfèrent faire profil bas.
Jusqu'en 2000, les Hbl versaient plus de 1 million de francs (153 000 euros) de
redevance à la commune », raconte Francis Prymerski.
Des cales de 8 centimètres sous le lit
Avec Robert Glanois, prof de maths au lycée de Saint-Avold et actif président de
l'Association de la consommation, du logement et du cadre de vie de Rosbruck,
Francis, vice-président, sillonne les rues du village à la rencontre des
sinistrés.
Sylvie Heschung, coiffeuse à domicile, leur raconte, encore sous le choc,
comment le carrelage de son hall d'entrée s'est soulevé et brisé en mille
morceaux à 3 h 30 du matin la veille. « J'en suis encore toute tremblante. J'ai
cru que quelqu'un cassait mes fenêtres en pleine nuit », dit-elle, terrorisée.
Chez Sophie et Jean Mahou, soixante-quatorze et quatre-vingt-deux ans, les
meubles sont tous sur cales. 8 centimètres sous le lit, presque autant sous la
gazinière. « Sinon on ne pourrait même pas faire chauffer une casserole d'eau. »
Propriétaire de la station-service du village, le couple vit dans une maison en
pente. « J'ai l'impression d'être sur un bateau. D'ailleurs je prends des
médicaments contre le mal de mer », dit Sophie, qui se déplace à petits pas en
prenant appui sur le mur pour ne pas tomber. Les amis ne viennent plus, « ils
ont le vertige chez nous. On ne nous livre plus de Gpl car c'est devenu trop
dangereux. Les cuves risquent de se fissurer ».
52 704,48 euros de dédommagement pour une maison
Au numéro 44 de la route nationale, les époux Kaas sont dans les cartons. Ils
partent vivre près de Forbach. Leur maison, achetée 230 000 francs en 1992 avec
toutes leurs économies, est à l'état de ruine.
L'escalier qui mène aux chambres s'est désolidarisé du mur, les portes et les
fenêtres ne s'ouvrent plus, et une grande crevasse traverse le salon.
«
La maison penche de 39 centimètres. On est fatigués, on a des maux de tête et
mal au dos », explique Evelyne, quarante-trois ans, des larmes dans la voix.
En juin, le tribunal de grande instance de Sarreguemines a condamné les
Charbonnages de France à payer 52 704,48 E à Evelyne et son mari, Serge. Une
misère. Le fonds de garantie (voir encadré) leur accorde une maigre rallonge
d'environ 50 000 euros. « Ça ne suffit pas pour racheter quelque chose. On a dû
prendre un crédit pour notre nouvelle maison alors qu'on venait juste de finir
de payer celle-là », déplore Serge.
Déjà 60 maisons démolies
Chez les Tournery, l'amertume laisse place à la colère. Gabriel, clone de
Coluche dans Tchao
Pantin, a son franc-parler. En jeans et santiags, le cheveu gominé,
il dénonce « les politiques, les technocrates, les experts et autres, qui nous
considèrent avec mépris ».
En 2003, les Charbonnages lui accordent le droit de réparer sa maison mais,
moins d'un an plus tard, l'expert du fonds de garantie déclare l'édifice
dangereux, avec risque d'effondrement imminent.
Le 15 février, un courrier du maire lui interdit l'accès à sa maison. « J'ai
vécu ici quarante et un ans. Aujourd'hui, on me fout dehors sans m'indemniser.
Il faut attendre qu'il y ait un mort pour que les choses bougent ? »
A
l'intérieur de la maison fissurée de toutes parts, les portraits de sa mère,
décédée, côtoient les posters d'Elvis. Des revues sur les vieilles voitures
américaines sont posées en piles instables sur le juke-box. « On nous interdit
d'habiter notre maison mais les politiques continuent d'empocher les impôts
fonciers ! » s'emporte Gabriel.
Dans la rue Saint-Hubert, il ne reste plus que le numéro 16, la maison des
Tournery. Les autres ont été démolies, 60 au total dans le village. Il y a
quelques mois, les maisons des voisins accolées à la sienne ont été arrachées de
terre, celle de Gabriel s'en trouvant encore un peu plus fragilisée.
Au numéro 4 de la rue du Moulin, la situation est tout aussi ubuesque. La maison
de Renée et Rodolphe Bindges a été relevée à grands frais en 1994. La technique
consiste à déterrer totalement le bâtiment en creusant sous les fondations et à
le redresser à l'aide de vérins hydrauliques.
«
Les marteaux piqueurs toute la journée, des tranchées tout autour de la
maison... c'était l'enfer. Mais ça n'a servi à rien. La maison est à nouveau
fissurée de haut en bas », constate Renée, ancienne salariée des Hbl, attachée
au service des relations publiques.
76 autres familles ont vu leurs résidences ainsi redressées. « Le relevage
réalisé par l'entreprise Tsv, une filiale des Hbl, nécessite entre huit mois et
un an de travaux et coûte parfois trois fois le prix des maisons. Depuis quinze
ans, Rosbruck a des allures de chantier géant », fait remarquer Francis
Prymerski.
Vivre en pente, pas de problème, explique l'expert
Rue des Jardins, alors que le reste du village s'enfonce, les maisons ont gagné
en altitude. 50 centimètres par-ci, 1 mètre par-là. Il a fallu ajouter des
marches au perron pour accéder aux portes d'entrée. « Les gens vivent dans des
conditions déplorables. Mais que ce soit devant le tribunal de Sarreguemines, où
sont portés nos dossiers de demande d'indemnisation, devant la cour d'appel de
Metz ou en cassation, nous rencontrons de grosses difficultés pour faire
reconnaître nos droits », atteste Robert Glanois, documents à l'appui.
Dans un jugement rendu le 21 janvier 2003, le tribunal a débouté un habitant du
village qui demandait réparation, sous prétexte que, en tant qu'ancien mineur,
il était parfaitement au courant des dégâts qu'allait subir sa maison.
Tout aussi intolérable : en juin 2003, devant ce même tribunal, un expert a
démontré que vivre « en pente » ne présentait aucun danger ni désagrément pour
l'être humain, « car il circule en permanence sur une pente d'environ 7 % pour
les hommes et pouvant aller jusqu'à 25 % pour les femmes, pente qui représente
la hauteur des talons des chaussures ».
Ce qu'écrit l'expert noir sur blanc pourrait prêter à rire s'il n'y avait dans
la balance de la justice le destin des familles de Rosbruck. « C'est l'histoire
du pot de fer contre le pot de terre. Seule une vraie volonté politique fera
bouger les choses. Mais, lorsque les Charbonnages de France auront
définitivement plié bagage, le 31 décembre 2007, il sera trop tard pour crier au
scandale et descendre dans la rue avec les écharpes de maire en bandoulière »,
prévient Francis Prymerski.
En attendant, il lutte aux côtés de Robert Glanois et de son association pour
que Rosbruck ne disparaisse pas de la carte. Le bar-tabac qui trônait au centre
du village a laissé place à un grand terrain vague. L'église, rasée en 1993 et
reconstruite par les Hbl, compte déjà trente-six fissures. Francis Prymerski les
a comptées.
Céline Lutz,
6 février 2005
16 octobre 2004
1er juillet 2004
2 mars 2004
Journal « LIBERATION »
La mine laisse
les villages mosellans de guingois
Le comblement
jugé trop coûteux
Par Thomas Calinon
C'est
l'histoire d'un village bancal, qui perd de l'altitude. A Rosbruck (Moselle),
dans le bassin houiller lorrain, le point le plus bas de la commune s'est
enfoncé de 15 mètres en 20 ans. Tout autour, le terrain s'est affaissé, formant
une cuvette de 2 kilomètres de diamètre. Conséquence, la quasi-totalité des
maisons sont en pente ou fissurées. Soixante ont dû être rasées, dix autres
devraient disparaître prochainement. Aux fenêtres, les rideaux tombent
bizarrement de travers. Les habitants ont pris l'habitude de gravir des côtes
sur leur carrelage et de vivre avec des cales. Il en faut sous la cuisinière
pour faire une omelette. Et sous le lit pour dormir à l'horizontale. C'est la
faute aux veines de charbon que les Houillères du bassin de Lorraine (HBL),
filiale de l'établissement public Charbonnages de France, ont creusé sous ce
village de 900 habitants. Au milieu des années 80, pour faire des économies, les
HBL ont exploité les galeries par foudroyage. Le procédé consiste à laisser
s'effondrer les terrains derrière le passage de la haveuse, au lieu de remblayer
les galeries avec des apports extérieurs. D'où les problèmes d'affaissements en
surface.
Sinistrés.
Aujourd'hui, les mines ne sont plus exploitées. En septembre, les HBL ont fermé
leurs puits de Freyming-Merlebach, commune voisine de Rosbruck. Fin avril, c'est
le site de la Houve, à Creutzwald, quelques kilomètres au nord, qui connaîtra le
même sort. On célébrera alors la fermeture de la dernière mine de charbon de
France. A Rosbruck, la perspective inquiète. Le maire, Pierre Steininger, et
Bernard Glanois, président de l'association Consommation, logement et cadre de
vie (CLCV), redoutent que les HBL partent «sur la pointe des pieds», en
déboursant le moins possible pour les sinistrés. Un rapport d'information sur
l'application de la loi «après-mine» du 30 mars 1999, présenté en 2002 par le
député mosellan Jean-Yves Le Déaut (PS), a d'ailleurs mis en cause l'exploitant,
estimant qu'«il est choquant que celui-ci cherche constamment à se dégager de
ses responsabilités». Les HBL rétorquent que le député a omis de les interroger.
L'entreprise
est accusée d'être «juge et partie» en matière d'indemnisation des sinistrés et
d'appliquer ses propres règles, très contestées. Les Houillères n'interviennent
que si la pente dépasse 0,8 %. En dessous, ni indemnités ni réparations, alors
que les normes de construction prévoient une pente maximale de 0,2 %. «Mais des
textes prévoient une tolérance jusqu'à 0,7 %», dit Marc Nicolas, responsable des
dégâts miniers des HBL. Pour une déclivité comprise entre 0,8 et 3 % soit 30
centimètres de décalage pour une maison de 10 mètres de long ! , une
indemnisation est possible. Enfin, si la pente excède 3 %, HBL «relève» la
maison en plaçant des vérins sous les fondations. Cependant, si le coût de
l'opération est excessif, HBL la rachète et la démolit. Dans les deux cas, «les
sommes accordées sont dérisoires», accuse Bernard Glanois.
Procédure. Les
victimes doivent accepter les propositions des Houillères ou se lancer dans une
longue procédure judiciaire. L'entreprise met en avant le faible nombre de
dossiers portés devant les tribunaux (la CLCV en suit une quinzaine
actuellement) pour montrer que sa démarche est satisfaisante. «Souvent, les gens
préfèrent des indemnités modestes parce qu'ils sont pauvres et qu'ils ont peur
de se lancer dans des procédures longues», explique Bernard Glanois. Certains
l'ont pourtant fait, comme ces 33 familles qui ont saisi la justice en 1999 afin
que les HBL consignent à leur profit une caution pour réparer d'éventuels
dégâts. Déboutées en première instance, 26 d'entre elles ont poursuivi l'action
et obtenu gain de cause en appel à Metz l'an dernier. Mais les HBL, condamnées à
verser plus de 4 millions d'euros sur un fonds de garantie, se sont pourvues en
cassation. «Nous avons provisionné 27 millions d'euros pour répondre aux
sollicitations», précise Marc Prince, en charge des «services arrêtés».
Aujourd'hui, le
maire réclame l'intervention de l'Etat et une convention tripartite entre la
commune, HBL et l'association des sinistrés, de manière à établir des règles
d'indemnisation qui ne dépendent plus seulement du bon vouloir des HBL. En
attendant, le village continue à s'enfoncer. La Drire prévoit un affaissement
maximal de 1,5 mètre avant la stabilisation du terrain, prévue pour fin 2005. Un
délai que beaucoup à Rosbruck trouvent très optimiste.
26 octobre 2003
5 août 2003
2002
28 avril 2002
19 avril 2002
23 juin 2001
9 janvier 2002
6 décembre 2001
17 novembre 2001
9 novembre 2001
5 novembre 2001
26 juin 2002
30 novembre 2001
26 juin 2001
23
juin 2001
22 juin 2001
21 décembre 2000
1er décembre 2000
ANNEE 2000
9 décembre 1999
11 juin 1999
2 novembre 1998
5 juillet 1998
Première
manifestation de la CLCV
6 mai 1997
20 avril 1997
Le ras le bol des habitants de Rosbruck et environs
oblige les HBL à mettre en place un numéro
vert.
21 mars 1997
18 mars 1997
15 février 1997
Une
permanence HBL à la mairie de Rosbruck
9 janvier 1997
8 août 1996
20 février 1996
15 février 1996
23 janvier 1996
12 octobre 1994
24 septembre 1994
2 juillet 1994
18 mai 1994
24 Février 1994
23 septembre 1993
15 septembre 1993
Mai 1993
17 décembre 1992
7 août 1992
9 mai 1991
9 janvier 1986